samedi 27 avril 2019

L'APPEL : QUESTIONNAIRE CONCLUSIF.



1) Pourquoi avez-vous choisi cette restitution de votre voyage d'étude à Auschwitz-Birkenau ?

J'ai choisi cette restitution du voyage d'étude à Auschwitz-Birkenau car je me pose beaucoup de questions sur l'histoire des déportés. Cette histoire remue beaucoup d’émotions. Lorsque nous avons visité Auschwitz-Birkenau, nous avons essayé de percevoir et de nous représenter au maximum ce qu'ont senti et vécu les déportés, bien que cela soit impossible : ce que nous pouvons nous imaginer est infime par rapport à la réalité de ce qui s’est passé là-bas. De ce fait, travailler autour de la notion de mémoire sensorielle, qui est un des axes du projet du projet, nous a semblé, avec Madison et Elias, important.


2) Comment avez-vous procédé pour mener à bien ce travail ?

Afin de mener à bien ce travail, nous nous sommes posé beaucoup de questions, notamment à propos de ce qui nous a le plus marqué, que ce soit le bruit de la nature ou le silence, la localisation du site d'Auschwitz, ou encore les restes des blocs ou baraquements.

Puis, nous avons réfléchi à plusieurs possibilités pour pour mettre en relation nos différentes idées et ce que nous avions ressenti : tout d'abord le dessin (représenter un cauchemar à ce sujet), la musique ; puis est venue l'idée d'une bande son de nature, sur laquelle on entendrait des noms de déportés récités, comme lors d’un appel.

Cet appel fait référence aux longues séances d’appel qui avaient lieu en début et en fin de journée dans les camps.

Ce n’est pas une reproduction à l’identique de cet appel, ce serait impossible, parce qu’il y aurait trop de numéros (les noms des détenus n’étaient jamais dits, pour les déshumaniser), et que nous n’y étions pas, si on peut dire… C’est davantage une sorte d’appel-hommage, avec 14 noms qui réunissent des anciens détenus d’origine juive très célèbres, qui ont joué un grand rôle dans la mémoire de la Shoah, comme Simone VEIL ou Primo LEVI, mais aussi des personnes moins connues, car les déportés étaient originaires non seulement de toute l’Europe (S. VEIL était française, P. LEVI italien), mais aussi de toutes classes sociales (intellectuels, scientifiques, ouvriers, écrivain, petits employés). Parmi les noms que nous avons retenu dans notre liste, Mala ZIMETBAUM était couturière. Imre Kertesz était encore lycéen, Victor PEREZ était boxeur… Nous avons voulu une liste qui reflète la diversité des destins, des parcours, des origines, des âges des déportés.

Dans cette liste, il y a une femme qui n’est pas déportée raciale, mais déportée politique : Charlotte DELBO. Le choix de l’ajouter à cette liste n’était en aucun cas une façon de dire que tous les déportés avaient le même statut et le même sort, bien au contraire. Être déporté juif signifiait subir les sélections et être exposé en permanence au péril de mourir dans les chambres à gaz, et connaître le traitement le plus dur et le plus inhumain du camp. Charlotte DELBO n’étant pas juive, n’a pas subi de sélection. Mais elle a été tatouée. Le Camp a été, pour elle aussi, marqué dans sa chair. Elle aussi a subi l’expérience de déshumanisation de l’univers concentrationnaire. Son œuvre littéraire et poétique est un témoignage exceptionnel de l’Enfer des camps.

Sa présence dans la liste rappelle qu’Auschwitz-Birkenau était un complexe, réunissant camps de travail, centres de mise à mort, et diverses catégories de détenus classifiés selon un statut (racial, politique, droit commun…), ce qui instaurait une hiérarchie au sein du camp (dont les détenus étaient aussi conscients que les SS), les détenus raciaux étant, bien sûr, tout au bas de l’échelle, intégralement radiés de l’humanité, totalement niés en tant qu’êtres humains.

Pour ce qui est de la réalisation du document sonore, intitulé « vent et voix », tout d’abord, Elias MARTIN est allé en forêt enregistrer des bruits (vent dans les arbres, oiseaux…). Puis il nous fallait enregistrer une récitation des noms de déportés retenus. Aucun des 3 membres du groupe n’était germaniste. Ce sont donc des camarades de la section euro allemand, que nous tenons à remercier, qui a dit les numéros en allemands, puis en français (car il fallait comprendre l’allemand pour traduire. Pour marquer le passage du numéro en allemand au numéro en français, un camarade a dit les numéros en allemand (Gabin DUC, 2nde 3) et une camarade (Amandine JERRAM) les a dit en français. La camarade a été très touchée et contente de participer au projet (tout comme son camarade, d’ailleurs) , car elle était déjà allée à Auschwitz avec son père.

Puis son et voix ont été mixés par Sylvain Diamand.

Madison BLONDEL et Elais MARTIN ont fait les recherches documentaires pour le tableau explicatif et l’ont rempli.

J’ai fait les recherches documentaires sur la façon dont les appels se déroulaient au camp, et j’en ai fait un texte explicatif.


3) Quel est votre /vos moment/s le/s plus marquant/s de ce voyage (pas plus de 3) ?

Mes moments les plus marquants dans ce voyage ont été dans l'ordre la visite du four crématoire reconstitué à Auschwitz I, de nuit, la visite du musée dans lequel il y avait exposés les chaussures, les cheveux, les objets du quotidien ayant appartenu aux déportés, et les boîtes de zyklon B, le gaz qui a servi à assassiner ces déportés par asphyxie. Enfin, la visite d'Auschwitz-Birkenau avec le baraquement des femmes.


4) A qui avez-vous parlé en premier de ce que vous avez vécu? Que pouvez-vous dire de cet échange ?

La première personne à qui j'ai parlé de ce que j'avais vécu était ma mère. C'était un échange intense en émotions car, ma mère étant sensible à ce sujet, était émue. De mon côté, j'ai essayé de représenter au mieux ma pensée. J'ai aussi utilisé un livre avec des images que j'ai acheté sur le site pour m’aider à expliquer et décrire ce que je venais de vivre et de voir.



5) Vous attendiez-vous à ce que vous avez vu et perçu,vécu ? Quelles ont été vos impressions, sensations ?

Je m'étais mentalement préparée à ce que j'allais voir en lisant des livres sur le sujet. Mais, bien évidemment, même en étant préparée, on ne peut réellement pas s'attendre à ce que l'on a vu, tout simplement car c'est presque inimaginable humainement parlant.

J'ai tout d'abord été choquée en voyant tous ces (restes) de baraquements alignés, les chambres à gaz détruites...

Mais j'ai rapidement eu envie d'en apprendre plus encore sur le sujet, chercher le pourquoi et essayer de comprendre. J'en ai parlé avec Lilou MENNERAY et Madison BLONDEL, qui sont mes amies, puis nous avons discuté chacune sur notre point de vue.

Ce n'est pas le jour même que j'ai senti le plus de choses. C'est surtout en feuilletant, plusieurs jours après, le livre que j’avais acheté à la librairie d’Auschwitz I. Quand j'ai eu le temps d'analyser ce que j'avais vu, j'ai compris pleinement conscience que c'était une réalité, dans toute son horreur, qu’on n’arrive pas à dire, même si je n’en avais jamais douté. A ce moment là, j'étais triste et j'avais vraiment envie de comprendre comment des êtres humains ont pu commettre un tel crime.


6) Comment concevez-vous votre rôle de « passeur de mémoire » auprès de votre famille, de vos amis, de vos camarades au sein de l’établissement ou en dehors ?

Je suis heureuse d'être « passeuse de mémoire » auprès de ma famille, mes amis... Mais c'est aussi très important moralement car j'ai vu quelque chose que mes parents peut-être ne verront jamais et je sens aussi le besoin d'en parler, d'expliquer ce que j'ai vu, avec mon ressenti sur le sujet, et un maximum de précision.


7) Comment comprenez-vous l'intitulé du projet : "Auschwitz de l'intérieur " ?


« Auschwitz de l'intérieur » a plusieurs sens : tout d'abord, nous avons étudié ce projet en profondeur, en prenant chaque partie, comme la vie dans le camp, la structure du camp... ce qui est réellement à l'intérieur même d'Auschwitz.

Mais aussi, c'est à l'intérieur de nous, car nos sentiments, émotions jouent beaucoup dans le projet. Nous sommes allés dans le camp, nous avons vu ce qu'il en était, nous avons senti des choses, qui nous ont ensuite permis de réaliser concrètement notre projet, qui aurait été complètement différent si nous n'avions pas été à Auschwitz.

De ce fait, c'est l'intérieur de nos émotions ainsi que l'intérieur même du camp que nous avons étudié.



Alice MARTRET (1S5)